Suicide d’Evaëlle Dupuis : 18 mois de prison avec sursis requis contre l’enseignante accusée de « harcèlement »

Depuis ce lundi 10 mars au Tribunal de Pointoise, l'ancienne professeure de français d'Evaëlle Dupuis était jugée pour « harcèlement moral sur mineur » suite au suicide de l'adolescente de 11 ans en 2019. Face aux parties civiles, l'enseignante de 62 ans nie « avoir humilié Evaëlle ».

Evaëlle, une collégienne de 11 ans s'est suicidée à la suite de harcèlement scolaire © LE FACTUEL /LF-DB
Evaëlle, une collégienne de 11 ans s'est suicidée à la suite de harcèlement scolaire © LE FACTUEL / LF-DB

Le parquet a requis 18 mois de prison avec sursis ainsi qu’une l’interdiction d’exercer à l’encontre de Pascale L., l’ancienne enseignante d’Evaëlle. L’enseignante était accusée de harcèlement moral à son encontre et encourait 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende. La décision finale sera rendue le 10 avril prochain.

Initialement mise en examen pour « homicide involontaire » , l’enseignante avait obtenu un non-lieu, la juge considérant qu’il n’était pas « possible de déterminer les éléments précis ayant conduit (au) décès » de la pré-adolescente, qui faisait face à de nombreuses difficultés relationnelles.

La professeure se défend des accusations

Au long du procès, la professeure de français est accusée d’avoir dégradé les conditions de vie d’Evaëlle. en l’isolant, en l’humiliant devant ses camarades de classe et en créant un environnement scolaire hostile pour la jeune fille. La présidente du tribunal a relaté les faits reprochés à l’enseignante : « Pourquoi l’avoir isolée au dernier rang, cette jeune-fille ? » L’enseignante a expliqué qu’elle avait pris cette décision dans le but de protéger Evaëlle des élèves qui pouvaient être violents avec elle. Cependant, après avoir répondu à cette question, l’argument de l’enseignante n’a pas convaincu les parties civiles de ce procès. Plusieurs témoignages d’élèves, qui étaient dans la même classe qu’Evaëlle, ont décrit des scènes d’humiliations publiques, dont la professeure aurait été responsable.

Le moment le plus marquant du procès reste probablement l’incident survenu lors d’une « heure de vie de classe » où l’enseignante aurait demandé à ses élèves de dire à voix haute les remarques et critiques envers Evaëlle, qui a été contrainte de répondre sous la pression de ses camarades. Les témoignages évoquent une scène où l’adolescente pleurait, alors que la professeure lui ordonnait de parler. L’enseignante a reconnu avoir eu des paroles mal choisies, notamment lorsqu’elle a dit : « Arrête de pleurer« , et a exprimé son regret de ne pas avoir agi autrement. « Ce n’était pas dans le but de la mettre en difficulté, mais d’améliorer la relation dans la classe« , a justifié la professeure.

Une vision différente des faits

Tout au long de son interrogatoire, l’enseignante a insisté sur le fait que ses intentions n’étaient pas malveillantes et que son comportement était pour tenter de résoudre les tensions entre les élèves de la classe. Elle a réaffirmé qu’elle n’avait jamais voulu humilier Evaëlle, bien que plusieurs élèves aient rapporté des propos dénigrants, comme « Tu es bête, tu vas finir SDF« , ou encore « On peut pas être bête à ce point, tu n’as pas de cerveau« . Suite à ce témoignage, l’enseignante a reconnu avoir crié par moment sur l’adolescente, mais a contesté avoir prononcé certains des propos rapportés par les élèves et que certaines situations avaient mal été interprétées. « J’ai fait des erreurs, comme tout le monde« , a déclaré la professeure.

La souffrance de la famille d’Evaëlle

Le procès a accueilli de nombreux des témoignages, notamment celui de la mère d’Evaëlle, qui a réagi après l’audition de l’enseignante. « Elle commence à montrer son vrai visage« , a commenté la mère de l’adolescente, pointant le manque d’empathie de l’enseignante et ses tentatives de se dédouaner des faits et minimiseer la gravité des évènements qui ont eu lieu durant ses cours. « Ce n’est jamais de sa faute« , a-t-elle ajouté.

De son côté, la professeure de 62 ans a évoqué la pression médiatique qui a pesé sur l’établissement et sur elle-même après le drame, et a relayé sa souffrance face à la mise en cause pour un comportement qu’elle considère comme étant mal interprété. « Si, moi, la digue se rompt, c’est terminé« , a-t-elle confié.